La dernière enquête de KnowBe4, spécialiste en gestion des risques et des solutions de sécurité, sur la désinformation en Afrique a révélé une contradiction frappante : alors que 84 % des personnes interrogées utilisent les médias sociaux comme principale source d'information, 80 % admettent que la plupart des fausses nouvelles en proviennent. Malgré cela, 58 % n'ont jamais reçu de formation sur l'identification de la désinformation.
Cet écart de confiance fait écho aux conclusions du Rapport Afrique sur la Cybersécurité et la Sensibilisation 2025, où 83 % des personnes interrogées ont déclaré qu'elles reconnaîtraient une menace de sécurité si elles en voyaient une, mais 37 % étaient tombées dans le piège de fausses nouvelles ou de la désinformation, et 35 % avaient perdu de l'argent à cause d'une escroquerie. Sur ce constat, les spécialistes expliquent que les humains ne sont pas des processeurs rationnels d'informations :
“ Nous sommes émotifs, biaisés et câblés pour croire aux choses qui semblent faciles et familières. Les campagnes de désinformation, qu'elles soient politiques ou criminelles, exploitent cela”.
Ainsi, il y a l’effet de vérité illusoire. Plus quelque chose est facile à traiter, plus nous sommes susceptibles de le croire, même si c'est faux. Il y a aussi l’effet de simple exposition : plus nous voyons quelque chose souvent, plus nous avons tendance à l'aimer ou à l'accepter, quelle que soit son exactitude. A noter enfin le biais de confirmation : nous sommes plus susceptibles de croire et même de partager de fausses informations lorsqu'elles correspondent à nos valeurs ou à nos croyances.
Par ailleurs, le rapport d’enquête de KnowBe4 note que selon l'Africa Centre for Strategic Studies, les campagnes de désinformation sur le continent ont presque quadruplé depuis 2022. Plus inquiétant encore : près de 60 % sont commanditées par l'État, visant souvent à déstabiliser les démocraties et les économies. La montée de la manipulation assistée par l'IA ajoute de l'huile sur le feu. Les deepfakes permettent désormais à quiconque de fabriquer des vidéos ou des audios presque impossibles à distinguer de la réalité.
Mais il ne s'agit pas seulement de sécurité nationale ou de manipulation politique, il s'agit aussi de la survie des entreprises. Les attaquants d'aujourd'hui n'ont pas besoin de franchir le pare-feu. Ils peuvent tromper les employés. Ces attaques de désinformation ou basées sur des récits d'entreprise peuvent également se décliner en de faux communiqués de presse, des PDG deepfakes ou des fausses informations virales qui peuvent ruiner des réputations avant même que le service des relations publiques ne se connecte.
Alors, que peut-on faire face à ces menaces? “ Bien que les défenses alimentées par l'IA puissent aider à améliorer les capacités de détection, la technologie seule ne nous sauvera pas. Les organisations doivent également construire une immunité cognitive, la capacité pour les employés de discerner, vérifier et remettre en question ce qu'ils voient et entendent”, soutient KnowBe4 avant de souligner que la bataille contre la désinformation n'est pas seulement technique, elle est psychologique. Dans un monde où tout peut être falsifié, la capacité de faire une pause, de penser clairement et de remettre en question intelligemment est une couche de sécurité vitale. La vérité est devenue une cible mouvante. Dans cette nouvelle ère, la clarté est une compétence que nous devons perfectionner.